Les différentes utilisations de la couleur en planétaire

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La notion de couleur est souvent discutée chez les amateurs. L’objet de cet article n’est pas de débattre de la notion de réalisme, ou de naturel, mais de décrire les trois types d’images en couleur qui sont utilisées en planétaire, et leurs intérêts respectifs : les « vraies » couleurs, les « fausses » couleurs, et les images monochrome colorisées…

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Les trois types d’images en couleurs : en vraies couleurs à gauche (RVB), en fausses couleurs au milieu, en image monochrome colorisée à droite

Les images en « vraies » couleurs

On appelle images en « vraies » couleurs celles qui sont réalisées avec les méthodes RVB ou bien LRVB. La notion de « vraies » couleurs est beaucoup discutée ; on ne reviendra pas ici sur le débat, par contre on les définira comme traduisant des notions physiques réelles basées sur les albédos de chaque détail : les couleurs sont ici objectives. Par exemple, la Grande tache rouge de Jupiter, sur des images en vraies couleurs, apparaît en rose ou orange, parce que les nuages qui la constituent absorbent beaucoup le bleu, pas mal le vert, mais beaucoup moins le rouge.

Le rôle des images en vraies couleurs est très important en planétaire. En effet, comme elles sont objectives, leurs variations vont traduire des changements physiques réels sur les objets étudiés. Le cas d’école étant, par exemple, la coloration de l’oval BA en orange en 2006 : cette couleur était réelle, et elle démontrait l’évolution de cette formation d’anticyclone blanc, en tache rouge (les taches rouges sont une classe d’objet à part sur Jupiter, parmis les anticyclones).

En tout état de cause, ce qu’il faut retenir de la notion de couleurs, c’est qu’elle est un code d’interprétation. 

Les images en « fausses » couleurs

Les images en fausses couleurs sont toujours réalisées à partir de plusieurs images, mais en général prises en dehors des longueurs d’onde visibles (RVB). Le plus souvent, on utilise des prises de vue en infrarouge et/ou en ultraviolet. La technique d’assemblage est la même qu’en RVB, sauf qu’à la place de la couche rouge, on va par exemple mettre une infrarouge, et à la place de la bleue, une ultraviolette. On peut inclure une méthane…

En fausses couleurs, les couleurs sont toujours un code,mais artificiel, dont l’objet est de différencier l’aspect des détails dans chacune des composantes de base. Mais les couleurs n’ont pas d’importance en tant que telles, elles sont relatives : peu importe qu’un détail apparaisse rouge par exemple, ce qui compte, c’est de voir que le détail d’à côté n’est pas rouge, mais d’une autre teinte, peu importe laquelle, ou bien de voir que d’autres détails sont rouges eux aussi. Sur l’exemple de Jupiter ci-dessus, la lecture serait la suivante :

  • En vert, ce sont les détails des nuages bas, ceux imagés sur la couche infrarouge, par exemple les bandes brunes.
  • En bleu, les détails qui réfléchissent l’ultraviolet, des nuages élevés et peu transparents : les zones nuageuses claires
  • En rouge, les nuages les plus élevés, anticyclones (BA est visible) ou voiles polaires.

On pourrait parfaitement intervertir ces couches ; les teintes seraient complètement différentes, pourtant l’interprétation resterait la même. Ce n’est pas le cas en couleurs réelles, où si la couleur change, l’interprétation aussi !

L’intérêt de ce type d’assemblage en planétaire est mitigé. L’utilisation ci-dessus sur Jupiter est intéressante, mais l’interprétation des couleurs, qui font intervenir des détails de types assez différents, est malaisée ; l’interprétation sur les images de base doit rester le mode privilégié.

D’autres utilisations sont vues quelques fois, mais je reste très dubitatif sur leur intérêt. On le voit souvent sur Vénus par exemple (avec des compositages en IR/V/UV), mais dans le cas de cette planète, on mélange des couches nuageuses qui n’ont peut être rien à voir les unes avec les autres.venusfalsecolor Voir l’image ci-dessous, assemblée avec une couche verte synthétique ; quelle serait l’interprétation du bleu, et celle du rouge ? Comment justifier le fait de combiner les deux ?

Dans tous les cas, je pense que la bonne question à se poser si on souhaite faire une image en fausses couleurs est : suis-je capable d’expliquer clairement, de justifier, le code de couleurs ? Dans le cas contraire, il vaudrait mieux s’abstenir… on ne devrait pas faire ce genre d’images pour des raisons esthétiques purement subjectives.

Les images monochrome colorisées

Ce dernier type de couleur est plus rare, mais on le voit de temps en temps. Dans ce cas, on prend une image monochrome et surtout monobande (une IR, une bleue…) et on la colorise dans un logiciel de retouche photo. Sur la planche du début, j’ai par exemple passé une image infrarouge de Jupiter, d’origine en niveaux de gris, en rouge.

La colorisation d’images monochrome n’a guère de signification, et n’apporte aucune information supplémentaire, contrairement aux deux types précédents, puisque rien ne change dans l’image : il n’y a pas de code, la couleur est factice. J’aurais très bien pu la passer en vert :-)). Personnellement je trouve même que ça gêne considérablement l’interprétation, surtout si je souhaite comparer entre elles deux images prises à des longueurs d’onde différentes, mais qui auraient été colorisées l’une en bleue, l’autre en rouge… ce qui compte dans une image monobande ce sont les variations d’albédo des détails, qui traduisent les différences d’absorption ou de réflexion de la bande passante choisie. La couleur n’apporte rien !

Enfin il faut aussi tenir compte du fait que dans certains cas, des personnes non expérimentées pourraient avoir tendance à confondre ces images en couleurs factices avec des images en vraies couleurs. C’est le cas quand on choisit de coloriser par exemple des images infrarouges d’Uranus en vert… les détails ne sont pourtant pas les mêmes ! Il faut de toutes façons bien prendre soin de préciser que l’image a été colorisée. uranusfalscolor 

Ainsi à droite, il y a deux images « en couleurs » d’Uranus : celle du milieu est la version infrarouge de gauche colorisée en vert ; celle de droite est une version RVB en couleurs réelles. On voit bien que cette dernière ne montre pas le système de bande visible en IR. Or c’est cette dernière qui doit servir de référence pour les observations visuelles, et pas celle du milieu.

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